Dans cinq ans, tu seras chef de projet
Le développeur est-il mal aimé ?
July 28, 2016
Dave Lawper est développeur dans une SSII (ou ESN pour les puristes) depuis quelques années. Il s’apprête à fêter son trentième anniversaire. Son job, il l’aime. Ecrire du code, faire de la veille, interagir avec ses équipiers et débattre qui de Postgre ou Mysql est le meilleur, voilà ce qu’il aime. Pourtant, depuis une année ou deux, son manager qui “gère” sa carrière le tanne avec un sujet, et n’a pas l’air décidé à lui lâcher la grappe.
“Il va falloir que tu passes chef de projet. Tu ne peux pas rester développeur. On n’arrivera plus à te vendre.”
La menace était posée. A peine voilée. Mais le message était plus que clair. Être développeur à plus de trente ans, c’est la loose.
Pourtant, Dave Lawper n’est pas mauvais dans son domaine. De l’avis même des collègues et partenaires avec lesquels il a travaillé, et de ses clients même, il est même plus que bon. Mais cette épée de vérité Damoclès plane au-dessus de sa tête. Rester développeur, c’est mal.
Chef de projet, est-ce le passage obligé de tout développeur ? Certains diraient que oui. Parce que dans chef de projet, il y a chef. Chef par opposition à grouillot de base ou encore bidasse. Le développeur est l’échelon 0 d’une carrière. Le passage obligé avant d’accéder au St Graal. Le pavillon en banlieue. La berline allemande. Le mariage avec une Desperate Housewife.
Ou pas.
La vision communément admise dans la sphère professionnelle est de toujours “grimper”. Grimper les échelons, pour arriver aussi haut que possible dans la hiérarchie. Pourtant, notre Dave Lawper aime ce qu’il fait. Il aime sentir le code sous ses doigts, être l’acteur de l’évolution du projet auquel il est affecté. Il est proche de son processeur et aime sa RAM. Son IDE est son plus fidèle confident, et il a même donné un petit nom à son poste de travail. SQL n’a plus de secret pour lui. Il connaît toutes les subtilités de Java 8. Il est un early adopter de Docker. Il aime plonger ses mains dans le cambouis.
Et voici qu’on le presse pour devenir chef de projet. Chef de projet. C’est probablement un poste aux défis nombreux et aux problématiques passionnantes. Gérer des budgets, gérer des ressources personnes. Défendre un projet devant d’autres chefs qui ont des berlines allemandes encore plus grosses que la sienne. Mais quid de son petit Java chéri et ses nuits endiablées à optimiser une requête SQL pour gagner encore quelques millisecondes ? Quid de toutes les compétences que Dave Lawper aura acquises durant toutes ces années au poste de développeur ? Il ne voit aucun point commun entre ceux deux métiers. Alors Dave Lawper se demande : “Pourquoi un développeur évolue en chef de projet ? Est-ce qu’un meunier qui moud de la farine évolue en boulanger qui gère plusieurs ingrédients dans l’équipe qui constitue son pain ?”
Clairement pas.
Et si Dave Lawper restait développeur ? Et si on arrêtait de le regarder de travers parce qu’il n’est “que” développeur arrivé à 30 ans ? Et si être développeur n’était pas une honte dont on souhaiterait se dépêtrer le plus jeune possible ? Et si rester développeur signifiait enfin acquérir une expérience dans l’ingénierie logicielle à faire valoir ?
Et vous, oserez-vous rester développeur au-delà de 30 ans ?
Dave Lawper est fier d’être développeur.
Rémi Doolaeghe est un développeur freelance Java partisan du manifeste agile et de l'artisanat logiciel. Il a développé son expérience pendant 5 années au service d'éditeurs de logiciels de la métropole lilloise avant de devenir développeur indépendant. L'agilité et la collaboration sont ses moteurs dans un univers où l'expertise technique à elle seule n'est qu'un premier pas vers l'excellence.
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